02 Les diamants de l'archiduc by Jean Failler

02 Les diamants de l'archiduc by Jean Failler

Auteur:Jean Failler [Failler, Jean]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Policier
Éditeur: Editions du Palémon
Publié: 2012-08-27T22:00:00+00:00


CHAPITRE IX

Dès le lendemain, après être sortie du commissariat où elle avait plus ou moins tourné en rond toute la journée, Mary se rendit impasse de Judée, chez Fernand le lapin, comme elle l’avait surnommé, faute de connaître son véritable patronyme.

Elle n’eut aucune peine à trouver le N° 12 car c’était la seule maison particulière qui subsistait dans cette allée autrefois bordée de jardins fleuris séparés de la chaussée par des grilles de fer couvertes de rosiers exubérants. Les autres villas avaient disparu pour faire place à des cubes de béton de cinq étages qui assombrissaient l’étroit passage.

Désuète avec son toit pointu, et ses balustres de bois peint qui tombaient en botte, ses étroites fenêtres à meneaux et ses volets métalliques rouillés, la maison du maquettiste orfèvre se terrait au fond de son étroit jardinet, comme si elle redoutait d’être écrasée par ses imposants voisins.

Il n’y avait pas à se tromper. Néanmoins, Mary s’assura qu’elle était bien chez son homme en consultant la boîte aux lettres pendue par deux fils de fer à une porte métallique verdâtre, bouffée par la rouille. Elle ne put réprimer un sourire en lisant le nom porté sur la carte de visite incluse dans le regard de tôle : elle n’avait pas tapé loin en surnommant Fernand « le lapin ». Car Fernand s’appelait Lelièvre, en un seul mot, mais Lelièvre quand même. Germaine et Fernand Lelièvre. Il y avait donc une femme au logis. Mary lui avait pourtant trouvé une tête de parfait célibataire.

— Faut pas se fier aux apparences, marmonna-t-elle entre ses dents en actionnant une chaînette si rongée par l’oxydation qu’elle s’était rompue en plusieurs endroits et avait été raccommodée tant bien que mal par des attaches trombone. Au fond du jardin, une clochette tinta.

Elle entendit grincer une porte et des bruits de sabots résonner sur du ciment. Puis Fernand apparut, une sorte de vaste cape sur les épaules, en faisant craquer sous ses pas le maërl sale de l’allée.

Un palmier solitaire avait poussé au milieu du jardin, élevant très haut sa touffe de feuilles bruissantes et rouillées, comme s’il avait voulu à toute force se rapprocher d’un soleil qui devait bien lui faire défaut. Il s’acharnait à vivre là, ses racines fichées dans la glaise humide, infiniment triste dans ce lugubre jardin cerné de béton où la nuit tombait.

Mary se souvenait de ces arbres qui poussaient par rangées entières dans certaines villes de la côte méditerranéenne. Elle les revoyait exubérants, luxuriants, épanouis, bien dans leur écorce, en quelque sorte des palmiers heureux. Oui, elle avait rencontré des palmiers heureux ! Celui-ci, dégoulinant d’eau, maigre, noirâtre, paraissait triste, désespéré.

J’ai quand même de drôles d’idées, se dit-elle tandis que la silhouette de Fernand s’approchait, il ne me suffit plus de l’enfance malheureuse et des animaux martyrs, voilà que je m’apitoie sur les arbres à présent !

— Ah, c’est vous ! s’exclama Fernand en tirant à lui le portillon de fer qui gémit sur ses gonds rouillés.

— Bonsoir monsieur Lelièvre, dit Mary. Je ne vous dérange pas ?

— Non ! Non bien sûr, protesta le petit homme en s’empressant.



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.